La véritable histoire de Noël.
La vérité se doit d'être accessible à tous ! Elle finit toujours par éclater malgré les couches de mensonges saupoudrées par les hommes.
Voici donc mon cadeau en cette fin d'année : la véritable histoire de Noël !
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Jadis, en ces temps éloignés où la terre n'était pas encore ronde, vivait un menuisier itinérant répondant au nom de Pernø. Il était né en Suède et déambulait depuis au cœur de ce grand pays froid. Malgré la grande qualité artistique de ses créations, son chiffre d'affaire s'était effondré jours après jours suite à l'apparition d'une tribu fabriquant à la chaîne des objets en bois de piètre qualité. Poussé par une faim tenace, il s'était finalement résolu à quitter son pays natal.
Ses besoins primaires le poussaient vers le sud, vers une promesse de soleil et de farniente dispersée par des agences d'enjolivement des terres d'immigration temporaire.
Un 24 décembre (cette date compréhensible par l'homme moderne est offerte par l'auteur : obliger le lecteur à se lancer dans de fastidieux calculs pour convertir la date d'un ancien calendrier suédois en calendrier grégorien n'ayant aucun intérêt), un samedi pour être précis (puisque notre menuisier s'était réjoui, malgré sa misère, d'être enfin en weekend), notre homme s'était retrouvé coincé dans une épaisse forêt froide dont le tapis de neige ralentissait toute progression.
Dans toute l'ampleur de ses possibilités gelées de réflexion, le menuisier Pernø ne parvenait plus à trouver assez d'énergie pour avancer. Ses jambes rendues à l'état de tréteau le supportaient à peine. Chaque pas réalisé faisait passer le précédent pour une promenade de santé.
Comme dans un rêve, son attention se trouva tout d'un coup happée par un chat tenant une poule dans sa gueule. Le félin s'approcha du voyageur, la fourrure couverte de neige. Cette nuit là, tous les chats étaient blancs.
- Bonjour voyageur, je m'appelle Pøn. Aurais-tu vu une fermette dans les environs ? Mon amie Hard est très fatiguée, elle ne peut plus marcher. Je crois que nous nous sommes perdus.
Le froid avait tellement engourdi le cerveau de Pernø que celui-ci ne s'étonna pas de cette curiosité animale et entra dans la discussion.
- Je n'ai rien vu. Je suis à la recherche d'un abri pour la nuit. Penses-tu que les propriétaires de cette fermette pourraient m'offrir le gite et le couvert ?
- Aide-nous à rentrer chez nous et je suis sûr que mon maître t'accueillera.
Les trois amis se mirent alors en quête de la fermette, se motivant les uns les autres pour ne pas laisser le froid engourdir leurs volontés. Le chat était perché sur la tête de Pernø pour regarder au loin à la recherche d'un endroit familier. La poule était cachée sous l'épais manteau protecteur du menuisier.
Par chance, juste avant que la lune n'atteignit son zénith (c'est à dire un peu avant minuit : à cette époque les humains vivaient encore à l'heure des astres, utilisant cadrans solaires et lunaires pour se repérer dans le temps), les lumières de la famille Nø apparurent à l'horizon. Les derniers pas vers la fermette furent difficiles mais toute la troupe put passer sain et sauf le seuil de la porte.
- Bonjour, s'écria Otø, le patriarche de la maison. Merci d'avoir ramené mon chat et ma poule à la maison. Ces deux animaux sont notre seule richesse.
L'homme pivota pour laisser découvrir sa femme et poursuivit :
- Laissez-moi vous présenter mon épouse : Øfour. Que serions-nous devenus, ma chérie, sans notre chasseur Pøn et notre pondeuse Hard ?
- Ils m'ont aidé, répliqua Pernø. Votre chat m'a parlé, il m'a dit où se trouvait votre maison.
- Vouloir donner une langue à un chat n'est pas signe de vérité, mais vu l'aide que vous nous avez apporté, je vous accueille comme un prince.
Faisant quelques pas dans l'atmosphère apaisante de l'antre des Nø, Pernø découvrit un enfant assis sagement au coin du feu.
- Je vous présente mon fils Issan, s'exclama Otø. Mais où est encore passé ton frère ?
- Je suis là, cria une voix mêlée de rire, fusant d'un tas de bois.
- Son frère Øb passe son temps à se cacher, rigola Otø en direction de Pernø.
N'ayant que peu de richesse sur lui et ne sachant comment remercier cette famille pour tant d'hospitalité, Pernø sortit de son sac deux jouets en bois de sa création et les offrit aux enfants émerveillés.
- Regarde Papa, s'écria Issan, ce beau jouet, c'est une toureffe. Le nom du jouet est même gravé dans le bois !
- Et moi j'ai une coccine répondit Øb.
Curieuse, Øfour se pencha pour mieux voir les noms gravés sur ces deux jouets.
- Pourquoi avoir ajouté "Hell" à la fin de chaque nom de jouet, demanda-t-elle ?
- C'est une marque de fabrique... mon nom de famille, répondit Pernø.
Tous les convives étaient ravis de cet entraide et de ce partage. La joie était telle au moment de se restaurer que le chat et la poule rescapés du mauvais temps furent invités à table.
Et c'est ainsi que, dans sa grande fainéantise, l'Histoire retint :
"En cette soirée du 24 décembre, le bonheur fut partagé avec le père Otø Nø et la femme Øfour Nø. Pernø Hell offrit des jouets aux enfants Øb et Issan. Le chat Pøn et la poule Hard eurent une place de choix à la table des festivités."
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Depuis cette nuit, les religieux et les commerçants n'ont eu de cesse que de vouloir récupérer cette histoire simple et sincère en l'enjolivant de faits absurdes et surnaturels.
Partagez la vérité. Elle se doit d'être accessible à tous !
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